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L’hiver, c’est froid

Notre séjour à Mianyang s’est très bien passé, hébergé par une jeune designer d’intérieur. Nous y allumons de nouveaux quelques ballons et pétards. Le jour suivant nous nous rendons à Longnan, et les tunnels s’enchaînent sur la route. Les montagnes et les collines arides sont en continu jusqu’à Urumqi, entrecoupées de vallées de plus en plus grandes et désertiques.

Malheureusement ce trajet en autoroute et les grands « villages » chinois offrent peu d’occasions de prendre des photos. Encore, tout semble neuf et nos hôtes s’en désolent parfois, évoquant Xi’an, Beijing, où de vieux quartiers ont été plus ou moins préservés.

A Longnan nous demandons dans un magasin s’ils connaissent un abri où passer la nuit, début d’une longue série, et nous atterrissons dans une Église à  l’écart sur le flanc d’une montagne. Nous y découvrons pour la première fois les matelas électriques chauffants, une belle invention parfois remplacée par des réservoirs d’eau chaude sous les lits.

La nuit suivante à Tianshui sera difficile. Après avoir interpellé des dizaines de personnes et essayé mosquées et églises nous nous réfugions dans un hôpital, où un gardien de nuit nous accueille dans sa loge.

A Lanzhou nous serons plus chanceux, près d’une mosquée une femme et quelques jeunes s’occupent de nous et nous dormons dans la maison de l’un d’entre eux, discutant par l’intermédiaire de nos téléphones.

Le jour suivant un professeur d’anglais contacté sur Couchsurfing nous héberge dans une université. Il nous aidera à sortir de cette immense ville, puis à trouver un hôte quelques jours plus tard à Yumen. Nous commençons à avoir du réseau sur Wechat ! C’est leur Facebook à eux, qu’ils utilisent également pour payer dans les magasins.

A Haidong nous dormons dans un restaurant de nouilles, à Qingshizui dans la maison du cuisinier de la mosquée.
A Hangshui nous dormons avec des retraités dans un monastère bouddhiste où les femmes moines hésitent d’abord à nous héberger. Ils se chauffent tous au charbon et l’air de la ville est saturé, nos vêtements aussi.
A Jiayuguan un gardien de nuit nous permet de dormir dans des bureaux, nos sacs de couchage parmi les ordinateurs.

A Yumen, un conducteur nous accueille chez lui, et son hospitalité nous redonne un peu d’énergie. Il nous confirme que les Chinois du Nord Ouest sont très réticents à inviter des étrangers chez eux, mais lorsque la glace est brisée leur accueil est très chaleureux. Nous restons à Yumen une deuxième nuit, chez un ami de notre hôte de Lanzhou. Il fait froid mais nous sommes heureux de visiter la ville et de prendre notre temps. Il s’agit d’une très vieille ville de la route de la soie, et d’un des plus anciens champ pétrolier du pays. Aujourd’hui les puits sont remplacés par le photovoltaïque et des éoliennes par milliers. Nous sommes allés visiter ces forêts d’acier en voiture.

Nous passons donc trop souvent nos journées à marcher, manger et trouver un endroit où dormir. Heureusement nos déambulations nous amènent à voir des joueurs de pokers, des geeks jouant dans des salles, nous passons à côté d’usines, de gisements de charbon, de pépinières. Dans les voitures les paysages sont magnifiques, avec des cols à plus de 3500 mètres et des paysages proches de ceux de la Mongolie voisine. La route entre Xining et Zhangye est impressionnante et nous rêvons de retourner un jour dans le Qinghai. Près d’Urumqi, les vaches et les moutons sont peu à peu remplacés par des chevaux et des chameaux. A noter aussi, l’impressionnante présence de l’armée et de la police dans le Xinjiang, portiques de sécurité et contrôle des passeports sont fréquents, et les stations essence sont par exemple toutes protégées par la police. Leur renforcement daterait de cette année.

A Guazhou nous ne dormirons pas, la quarantaine de personnes abordées et les magasins ne nous proposeront aucune solution, excepté les DAB chauffés. Nous découvrons d’ailleurs qu’il y a bien quelqu’un derrière les caméras de surveillance, nous y restons à peine dix minutes pour nous réchauffer qu’un haut-parleur grésille.
Nous attendons donc le lever du soleil dans un restaurant ouvert H24.

A Hami et Turpan, nous trouvons finalement des hôtes dans la rue assez facilement et nous pouvons récupérer et discuter. Le premier est un étudiant en informatique qui parle anglais et nous pouvons nous passer enfin du traducteur de notre téléphone. Un traducteur qui s’avère d’ailleurs souvent gênant dans nos interactions, la technologie ne remplaçant pas encore très bien les simples gestes, notamment pour l’autostop.

Côté nourriture, car c’est important n’est ce pas, nous enchaînons les plats de pâtes fraîches de toute formes, généralement accompagnées d’un peu de bœuf ou de mouton, poivron, oignons et parfois haricots. Plus nous avançons plus nous trouvons également du pain, fourré aux haricots rouges ou parsemé de sésame. Résultat : c’est très bon !

Nous voici maintenant à Urumqi pour quelques jours, dans des paysages enneigés. Nous y avons planifié notre arrivée et nous avons donc un hôte… Nous devrons ensuite nous diriger vers le Kazakhstan.

La Chine nous laissera donc une impression mitigée concernant la proactivité et l’accueil des habitants, mais notre façon de voyager étant peu commune nous comprenons leur surprise et leur incompréhension. De notre côté nous avons essayé d’éviter la charité et nous avons fait du mieux possible pour être toujours hébergé de manière spontanée et volontaire, mais la tâche a été difficile. Si nous nous obstinons à éviter l’hôtel, c’est bien pour nous forcer à faire appel aux autres, et quelque part mettre à l’épreuve l’hospitalité locale. C’est aussi un moyen de rencontrer des personnes de tout milieu, et de découvrir des lieux originaux. Nous utiliserions la tente s’il ne faisait pas -15°C au petit matin: l’autostop dans ces conditions est déjà un défi. Affaire à suivre en Asie centrale !

A bientôt !

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La Steppe Kazakh

A Urumqi nous apprenons quelques détails sur les relations entre ethnies Han et Uygur. Le personnel des administrations est par exemple obligé de faire un stage d’un an dans un village Uygur, et doit amener régulièrement des cadeaux (<200 yuans) à la famille qui leur est attribuée. S’y ajoutent des appartements et du travail mis à disposition des Hans qui souhaitent s’installer au Xinjiang, et la pléthore de policiers et de militaires dans les rues. Fouille à l’entrée des grands magasins, fouille à l’entrée des villes. Jusqu’à la confiscation des briquets dans les bâtiments publics. Ces mesures découlent directement des milliers de Hans et d’Uygur qui se sont entretués en 2009.

Nous discutons de tout cela autour d’un hot pot. Nous restons trois nuits, le temps de nous reposer et de demander des renseignements à l’ambassade Kazakh.

Nous nous arrêtons ensuite à Kuitun, où une jeune chinoise abordée essaye de nous aider à trouver un hôte une bonne partie de la soirée. Nous finissons interpellés par la police, qui nous emmène au poste pour finalement nous proposer des hôtels. Nous refusons poliment et ils acceptent de nous ramener à la case départ, dans une rue du centre ville. Le froid est particulièrement mordant. Mais nous trouvons relativement rapidement deux gars sympathiques qui s’avèreront être… Des policiers. Ils nous hébergent et nous passons une bonne soirée autour de la bière Wusu, produite dans le village d’à côté.

Le lendemain un jeune conducteur nous prend en stop ainsi qu’un père et son fils. Nous traversons les montagnes et passons près d’un lac aux couleurs fantastiques, en nuances de brun, d’or et de blanc. Tout est gelé.

A Lucaogou nous trouvons rapidement un hôte dans la rue, un avant goût du Kazakhstan.
Ensuite le passage de frontière à Khorgos est très amusant. Il faut payer un ticket de bus 10 euros, ou bien avoir un vélo ou un cheval… On fait mine de monter sur le dos de l’autre. Ça rigole peu. On tente de s’imposer, en bon français, mais on finira par payer.

C’est terminé ! Un mois en Chine. Et de l’autre côté de la frontière le Kazakhstan est un autre monde. Les infrastructures sont vétustes, les voitures d’un autre âge, où dominent vieilles Audi, Mercedes, Lada et la Toyota Camri qui nous suit depuis deux mois déjà. Les vêtements militaires sont partout, les visages sont durs. On trouvera pourtant du premier coup notre hôte, Arcadi, un agronome moldave en mission dans la région. Peu loquace mais très sympathique, nous lui demandons s’ils boivent du thé en Moldavie, réponse « we drink all liquid ». Sans commentaire.

Nous passons un bon moment avec lui, dans un bel appartement que le bloc d’immeuble ne suggérait pas.
Si cette première image du Kazakhstan est conforme au stéréotype qu’on en a, la gentillesse des habitants, le confort de leurs maisons et la facilité de faire du stop fait contraste avec l’hostilité de l’environnement.

Notre seconde nuit, nous la passons avec Azamat, un jeune qui nous cite du Georges Sand et nous chante du Stromae. Sa culture est impressionnante. Il gagne 200 dollars par mois, en travail de nuit, c’est le seul salaire de sa famille.

A Almaty nous passons trois nuits chez Madi, nous visitons la ville enneigée, et les ambassades ouzbek et iranienne. Nous décidons de faire nos visas à Bishkek le lundi suivant et nous avons donc quatre jours pour visiter les alentours. Nous partons en direction du lac de Balkhash.
C’est la steppe à l’infini, tout est gelé. Le thermomètre dégringole jusqu’à -20°C la nuit. Nous dormons avec une famille dans un petit village de bergers perdu dans l’immensité de la plaine. Avec des amis, dont une championne d’haltérophilie, nous descendons une délicieuse vodka Kazakh. Rien à voir avec ce qu’on a en France.

Au matin nous repartons, la circulation est faible. Il caille. Mais un camion puis une voiture nous amèneront à Priosjorsk, où Morat nous trouvera dans la rue. Cet ouvrier d’une cinquantaine d’année nous héberge et nous fait visiter sa ville, ancienne base stratégique de l’armée soviétique. L’armée kazakh y siège toujours, et les canons comme les tanks y sont stockés par dizaines sans qu’on sache s’ils fonctionnent. On y voit également de vieux Mig 21 et des radars, impressionnant. Le tout au bord d’un des plus grands lacs du monde, totalement gelé, avec des traîneaux de pêcheurs au loin en route pour faire quelques trous de ci de là.

Le matin le givre couvre tout, les arbres comme les herbes. Le -10°C ambiant est accentué par le vent et nos pieds souffrent du contact avec le sol. Finalement, après une heure d’attente Morat nous aide et une voiture nous emmène à Shu, de nouveau vers le Sud. Ce détour glacé en valait le coup !

A Shu nous dormons avec les gardiens de nuit d’une Église Orthodoxe, et parlons brièvement avec un charmant Pope barbu. Ensuite nous bougeons vers Korday, on y mange dans un restaurant dont les propriétaires nous accueilleront pour la nuit. Leur fils est très curieux et nous avons d’intéressants débats avec lui sur notre propre culture.
C’est également là que nous rencontrons notre premier policier véreux. Il trouve un prétexte pour nous demander de l’argent, sous peine d’avoir des problèmes pour traverser la frontière… Il comprend vite à qui il a affaire et finit par partir en nous serrant la main. Serrer la main est très important par ici.

On traversera facilement la frontière vers le Kirghizistan, où les routes et les villes ne changent guère. Mais les belles montagnes au loin sont de bon augure…

Parlons de tout ça dans un prochain article !

A bientôt !

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L’attente des Visas

Le Kirghizstan est très ouvert au tourisme, ce qui nous permet d’y rester le temps de faire l’ensemble de nos visas, Ouzbek, Azeri et Iranien. Nous passons nos premières journées avec Rakhat un peu à l’écart de la ville. Il parle très bien français et met à profit son talent pour les langues en travaillant pour une agence de voyage à côté de ses études. On rencontre son père et un de ses amis, et mangeons ensemble quelques plats traditionnels, ces beignets remplis de viande de mouton par exemple, ou encore une boisson de blé fermenté.

Nous apprenons quelques histoires sur le Kirghizistan, l’épopée de Manas, le kidnapping des futures épouses qui tend heureusement à disparaître, ou encore le rôle des Kirghiz lors de la seconde guerre mondiale. Les mouvements de population dans l’histoire récente, les traditions de jeux et de danse, les yourtes au printemps, ou les combats d’animaux, tout montre une culture riche et très dynamique, conforté par l’essor du tourisme. Malheureusement pour nous, la plupart des activités culturelles du pays se déroulent en été.

La ville de Bishkek se visite rapidement et après avoir lancé les procédures de visa nous partons vers Karakol et le lac d’Issyk Kul. Sur la route nous dormons dans un petit village à proximité de Tokmok, où après quelques discussions dans la rue une grande famille nous accueille chaleureusement. On joue avec les enfants et parlons prix des choses et situation familiale, un classique, avec le traducteur bien sûr. Après ce bon moment nous passons le col et découvrons le lac, des canyons et de fantastiques montagnes.

Karakol ne sera pas une très bonne expérience, quelques alcooliques et junkies nous agressent, et le tourisme est assez omniprésent. Nous dormons avec un jeune dans une maison d’ouvriers, mais il tente de nous soutirer de l’argent le matin. Ce n’est pas représentatif du pays, et en contraste avec l’accueil formidable dans les petits villages et la gentillesse des conducteurs.

La nuit suivante nous sommes accueillis dans la mosquée d’un village au bord du lac et s’ensuivent de longues discussions sur l’islam. Nous mangeons avec l’imam et sommes finalement hébergés par un de ses amis.
Sur notre retour vers Bishkek nous dormons encore une fois avec la famille qui nous avait accueilli à l’aller. Nous leur avons ramené du miel et ils nous offrent en échange confiture maison et pain pour la route.

De nouveau à Bishkek nous sommes accueillis par trois indiens étudiants en médecine, très sympathiques et accueillants. Nous y resterons de nombreux jours en raison d’un problème informatique de l’administration iranienne, et nous savourons les plats indiens qu’ils cuisinent tout en échangeant beaucoup sur nos cultures. Cela nous donne très envie de visiter leur pays !

Nous rencontrons également Paul, un cyclotouriste français parti de Thaïlande pour rejoindre Paris. Il suit le même chemin que nous et nous échangeons nos impressions de voyage et nos astuces. Il est catholique engagé et organise son voyage sur ce thème, vous pouvez le retrouver sur www.acrossintheworld.com.

Un délai de plus dans l’attribution du visa Iranien nous met en danger pour la traversée de l’Ouzbékistan, dont les dates du visa sont fixées, mais nous pouvons finalement obtenir le visa en un jour avec l’accord du Consul.
Bientôt sur la route ! Ce calme de 10 jours est assez étrange dans notre rythme effréné, mais nous savons désormais notre trajet précisément. Dans l’ordre: Ouzbékistan, Kazakhstan, mer Caspienne, Azerbaijan, Iran, Arménie, Géorgie et Turquie. En espérant que le calendrier politique d’Erdogan ne perturbe pas notre arrivée à Istanbul.

Salut à tous !

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A travers le désert

Le col au sud de Bishkek est plongé dans le givre et le brouillard. Une quantité impressionnante de neige borde la route. Cet hiver des conducteurs y ont perdu la vie ou des membres, bloqués par -50 degrés… Nous sommes heureux que le temps soit plus clément, et la dangereuse beauté des montagnes nous accompagne vers Osh. Nous dormons sur la route chez un de nos conducteurs, grossiste de fruits et légumes, nous mangeons plov et pain maison en compagnie de ses enfants qui nous regardent avec de grands yeux. Sur les collines alentours des bergers dirigent leurs troupeaux à dos de cheval. Nous continuons vers Osh, traversons la frontière sans problème, bien que ce soit la première fois qu’on nous fouille intégralement.

En Ouzbékistan la vallée de Ferghana est très peuplée, c’est d’autant plus de personnes qui nous interpellent pour nous souhaiter la bienvenue. A Andijan nous dormons dans une usine de composants électroniques, après avoir rencontré dans la rue un de ses propriétaires. Nous partageons quelques brochettes de mouton et partons le lendemain vers Tashkent, pris en stop par un pâtissier très sympathique. Nous nous arrêtons dans sa maison de campagne avant de reprendre la route vers Samarkand. Un autostoppeur Ouzbek nous aide à arrêter des voitures, puis nous rencontrons un russe qui nous emmène à destination avec son gros 4×4, s’arrêtant de temps à autre pour jouer au sniper sur son téléphone. Il nous offre le café et nous parlons politique russe et cinema français, ce cher Gérard Depardieu… Arrivé à Samarkand nous dormons dans un hotel pour la première fois et nous espérons la dernière ! Administration Ouzbek oblige, nous devons nous enregistrer de temps en temps.

Le lendemain nous sommes pris à bord de deux camions qui nous emmènent à Nukus en deux jours. Nous dormons sur les couchettes des cabines, on peut ajouter ça à la liste des « premières fois ». Les villages à pertes de vue ont fait place au désert, où nous apercevons de nombreux chiens de prairie, aigles et chameaux.

Nous sortons de Nukus, dormons dans une cabane de bergers, et reprenons la route, toujours dans le désert. Nous rencontrons des jeunes parlant anglais et rêvant de voyages dans un restaurant pour routiers, puis nous essayons de continuer mais une tempête de sable nous amène à dormir dans un bâtiment en construction.

La route est de plus en plus boueuse et chaotique, mais notre marathon Ouzbek prend fin. A la frontière, de nombreux saisonniers se pressent, ils passeront les six prochains mois au Kazakhstan. Les policiers nous forcent à couper la file, comme d’habitude, pour notre propre sécurité disent-ils. Ils ne nous demanderont pas de coupons d’hôtel.

A Beyneu en marchant dans la rue nous sommes invités pour le nouvel an musulman par un groupe de professeurs. Le professeur de danse nous fait une démonstration, et nous parlons avec les professeurs d’anglais. Malheureusement ils seront trop alcoolisés pour nous trouver un endroit où dormir. Les mauvais plans font aussi partie du voyage. Nous passons de nouveau la nuit dans un chantier.

A Aktau nous restons trois nuits avec un hôte et sa famille, nous découvrons la mer Caspienne et pouvons finalement embarquer à bord du ferry pour Baku. Le manque d’organisation nous fait cependant faire nuit blanche, heureusement le propriétaire du bar du port nous offre thé, nourriture et compagnie. Le bateau reste en rade 20 heures avant que les vaguelettes et le vent se calment.

La traversée se fait en compagnie de routiers principalement kurdes, très sympathiques, mais après quelques échanges nous passerons presque toute la traversée à lire et dormir.

A Baku nous trouvons un hôte tard dans la nuit, il parle français, et beaucoup d’autres langues. Les polyglottes sont si nombreux dans cette région du monde ! Au matin nous discutons ensemble autour d’un thé et de baklavas avant de rejoindre Shamakhi. Les premiers paysages azéris sont grandioses, des collines vertes et sans arbres à l’infini.
Nous nous échappons dans ces collines, faisons des selfies avec un berger et dormons sous la tente. Nous entendrons les loups une bonne partie de la nuit, chantant à une centaine de mètres. Jolie berceuse !

Au matin nous allons vers Salyan, faisant quelques détours pour découvrir les montagnes. Des dizaines de cafés bordent la route, des tonnelles abritant des familles entières autour de barbecues.

A Salyan nous rencontrons un homme âgé dans un magasin, il nous invite chez lui. Nous dégustons des fromages et des pâtisseries avec toute la famille, l’arrière grand-mère, les petits enfants etc… L’accueil est très chaleureux, nous visitons leur grand jardin, taquinons les oies et leur chat, qui passera la matinée suivante à lorgner des bassines où le yaourt fermente.

Au Sud de Lankaran, à Xanbulan, nous dormons dans une belle forêt, mais sous la pluie. Nous discutons avec beaucoup de jeunes, avec la vendeuse de pain, avec des personnes qui nous interpellent pour nous inviter à boire le thé. Les azéris sont très curieux et très proactifs, nous sommes un peu triste de passer si vite dans ce beau pays.

Les gardes frontières iranien sont fantastiques, ils se regroupent autour de nous pour nous souhaiter la bienvenue avec de grands sourires, nous serrent la main, et un soldat parlant anglais s’occupe de nous jusqu’à ce que nos passeports soient vérifiés. Si on pouvait noter les postes frontières, celui là est au top.

Nous voici donc en Iran ! Un pays souvent décrié sur nos télévisions, assimilé à tort au monde arabe, aux guerres et à l’islam radical. Nous avons hâte de découvrir la réalité derrière les façades politiques…

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Les Perses

Nous avons mis du temps à trouver internet, désolé de ce manque de nouvelles ! Les Iraniens n’ont pas le wifi illimité mais ils le créditent de quelques gigas, rarement activés.

Après avoir traversé la frontière, nous nous retrouvons dans une ville très colorée. L’aménagement urbain est harmonieux, et les rues sont bordées d’arbres en fleurs. Nous échangeons nos premières poignées de mains iraniennes et discutons avec quelques curieux.

Notre premier conducteur et son compère nous amèneront directement chez eux pour passer la nuit. L’un est un ancien photographe professionnel, Habib Zahd, l’autre un plombier, Shide. Ils ne parlent pas un mot d’anglais, mais le courant passe. Ils vivent dans des pièces dénuées de meubles, avec des plaques de cuisson à même le sol avec lesquelles Shide nous prépare une excellente soupe et des boulettes de viande. Dans la pièce d’Habib, ses photos couvrent les murs, certaines primées, et on y trouve aussi une photo de lui plus jeune, moustache noir, sur une moto. On passe de bons moments ensemble. Ils nous amènent à un point de vue sur la ville de Hashtpar et la Caspienne, nous promènent dans un parc au bord de la mer et nous faisons un rapide détour dans les montagnes avant de nous séparer.

Le jour suivant nous arrivons à Rasht, où nous rencontrons Navi dans un petit restaurant. C’est un ancien boxeur sans vraiment d’emploi. Nous passons la nuit chez lui, et rencontrons son chien Michel.

Nous bougeons ensuite rapidement vers Isfahan, à travers de beaux paysages désertiques. Un couple nous offre à manger, du thé, des fruits, le tout en conduisant: mieux qu’une compagnie aérienne. Nous découvrons le sens de l’accueil iranien.

A Isfahan nous nous baladons sur la place Naqsh-e Jahan, et quelques jeunes nous abordent. Nous passons les deux nuits suivantes chez l’un d’entre eux, débattant beaucoup et visitant la ville. Nous goûtons également à de bons plats, notamment du poulet dans une sauce de noix mélangées à des pommes grenades caramélisées…

Ensuite, Shiraz. Encore plus de désert ! Nous dormons sous la tente à proximité de la ville, et visitons le bazar, la citadelle et les alentours. En mangeant dans un parc nous rencontrons un homme travaillant pour la Bourse iranienne, il nous explique leurs problèmes d’inflation et de manque d’investissement tout en nous proposant des beignets. Les beignets sont bons, la situation iranienne pas trop.

Le défi en Iran, c’est d’échapper à l’accueil des iraniens. Nous sommes sollicités en permanence  et un non ne suffit pas, il faut souvent s’enfuir et être impoli pour pouvoir avancer. Entre la Chine du Nord et l’Iran, un monde. Nous mangeons pain et saucisse dans un parc à l’intérieur d’un rond-point: un scooter nous apporte un tupperware avec viande en sauce et pomme de terre, chaud à point. Le conducteur nous dira juste « food ». Cinq minutes plus tard, le vendeur de fruits et légumes du coin nous apporte un délicieux melon découpé, dans une assiette. Cette situation décrit bien l’Iran. Chaque jour il faut refuser qu’on nous paie le taxi ou le bus, ou même nos courses… Nous espérons que d’autres européens ou le tourisme de masse n’en abuseront pas.

Nous partons vers Bushehr, avec une étape non loin de Qaemiyeh. On nous offre des glaces sur la route: après la neige vers Qazvin une semaine plus tôt, les températures sont maintenant proches de 30 degrés. Nous campons autour d’un feu, près des tentes de bergers nomades. L’environnement est magnifique, verdoyant et entouré de canyons.

Nous atteignons Bushehr le jour suivant, mais après avoir vu le Golfe Persan (Arabique) et bu quelques thés nous revenons en arrière pour dormir dans une oasis parmi les dattiers.

Nous remontons désormais vers le nord, quittant progressivement les dattiers et les orangers en fleurs pour les amandiers et les pommiers. Un conducteur nous invite à déguster un poisson frit et fourré de pomme grenade. Délicieux. Arrivé à Nurabad Mamasani nous passons la nuit chez un riche fermier et discutons longuement avec son fils sur la société iranienne. Nous rencontrons également leurs ouvriers afghans, pour certains renvoyés de Grèce ou d’Allemagne.

Le conducteur qui nous amène à Behbahan nous invite à dormir chez lui. Il nous montre son magasin de vêtements féminins et son pressing puis nous faisons un barbecue avec ses amis dans un jardin, le process est bien rodé. La culture du picnic est impressionnante en Iran : on voit régulièrement des familles mangeant tranquillement dans les parcs, les champs, et même sur le terre-plein entre deux routes.

Nous dormons la nuit suivante sous la tente, profitant du beau temps, dans un petit canyon à 20km au nord d’Andimeshk. On s’isole avec plaisir après avoir passé la journée à parler avec nos conducteurs, à négocier avec les taxis ou ceux qui souhaitent nous kidnapper deux heures autour d’un thé.

Nous sommes ingrats dans un pays où être pressé ne semble pas avoir de sens. Pourtant, sans s’imposer de rythme il faudrait plus d’un an pour le même voyage.

Dans un village au sud d’Hamedan nous sommes accueillis par une famille puis hébergés par un étudiant en sciences politiques. Malheureusement ce dernier parle peu anglais mais il s’occupe de nous et nous visitons les collines alentours avec son petit neveu de quatre ans, qui court bien plus vite que nous. Le plateau que nous suivons depuis plusieurs jours est souvent à plus de 2000 mètres d’altitude. Ça se ressent.

A Tikab ce sera de nouveau la tente, dans une sorte de verger. Sur la route on double de nombreux camions chargés de moutons ou de chèvres, dans l’autre sens ce sont des moissonneuse-batteuse allant vers le Sud où le blé d’hiver est à point.

Nos derniers jours Iraniens nous les passons dans les collines de Sufian. Nous mangeons nos sandwichs en observant un berger sur son âne, ses deux chiens coursant une sorte de gros renard gris à quelques mètres de nous. Le renard gagne la course.
Après avoir hésité à passer une autre nuit sous la tente nous interpellons deux jeunes dans des bâtiments agricoles. Ils nous hébergent dans ce qui s’avère être un élevage d’autruches. Leur cou est impressionnant, elles nous regardent de haut. Il pleut toute la nuit. Le lendemain nous tirons sur des conserves à la carabine à plomb et attendons que les nuages se vident en regardant alternativement la télé iranienne et la tortue de nos hôtes déambulant dans le jardin.

Une nuit de plus et le soleil réapparaît. On nourrit les autruches, on se fait pincer les doigts affectueusement et on finit par quitter la ferme et nos deux compagnons.

On rejoint rapidement l’Arménie où les dernières montagnes nous attendent !

L’Iran vaut le détour, ne soyez pas effrayés par nos médias. Les Iraniens sont des musulmans modérés et nous avons rencontré beaucoup d’athées. Les femmes conduisent et cachent bien plus leur cou que leurs cheveux avec leurs hijab… Et bien plus encore. Nous leur souhaitons de trouver la paix au delà des pressions internationales, gouvernementales et religieuses.

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Les derniers kilomètres

L’Arménie est plus montagneuse qu’on ne le pensait. Le sud est peu peuplé et miné par le conflit territorial avec l’Azerbaïdjan, pour le contrôle du Nagorno Karabakh.

Nous avons quelques difficultés à faire du stop car la plupart des voitures restent dans les vallées sans jamais passer les cols.

Nous dormons d’abord à Meghri dans les entrepôts de la mairie, après avoir échangé avec le gardien et mangé dans sa maison. La nuit suivante ce sera Goris, sous le parvis d’un hôpital franco-arménien, avec autorisation du directeur. Les ambulances nous réveilleront deux fois durant la nuit, toute une ambiance !

Les voitures arméniennes sont luxueuses en comparaison avec la richesse apparente des habitants. Est-ce l’argent de la diaspora ? Selon nos hôtes à Yerevan il s’agit davantage d’emprunts bancaires, de mafia, et d’une histoire de statut social. Une histoire qui se répète depuis l’Indonésie.
Autre type d’engin, nous croiserons deux tanks aux alentours de Kapan, en mouvement vers le Sud. Durant nos deux nuits dans ces environs nous entendons régulièrement des coups sourds au loin, sans savoir exactement s’il s’agit du bruit des armes. En tout cas les rues sont paisibles, et la population vaque à ses occupations. De nombreux civils portent des vêtements militaires, une mode de la région, aussi bien en Arménie qu’en Géorgie.

Les montagnes sont enneigées, et font parfois place à des canyons et à de belles formations géologiques, notamment autour de Goris. Nous hésitons à dormir dans des grottes mais la pluie est menaçante, le temps froid, et ce n’est pas le meilleur endroit pour être au sec.

Vers Yerevan la route plonge en direction de la Turquie et du mont Ararat. L’impressionnant volcan domine la plaine et se voit depuis tous les immeubles de la capitale arménienne. Presque l’intégralité de la population se concentre là, bloquée entre deux immenses contreforts volcaniques.
Nous marchons un peu dans cette ville qui se révèle agréable et vivante. Nous y mangeons une sorte de lahmaçun et des beignets salés, et passons de bons moments avec notre hôte, Arthur, un jeune développeur web. Nous buvons quelques verres avec ses amis aux profils variés: un militaire, une étudiante en économie et un artiste peintre.
Ils se moquent des conflits avec les pays voisins et la plupart d’entre eux souhaitent juste échapper aux problèmes économiques, politiques et mafieux en s’expatriant.
Ce sera malheureusement un court séjour dans le Caucase. Nous avons fixé notre limite de temps au 30/04 et la route est encore longue.
Nous rejoignons donc la Géorgie et dormons sous la tente à Akhalkalaki, puis avec des hôtes dans une ferme près d’Adigeni. On y prépare les champs de pommes de terre, et nous observons des villageois réparer l’inimitable Lada. Même modèle depuis les débuts de l’URSS, mis à part éventuellement les rétroviseurs. Les locaux ne sont pas avares de blagues sur le sujet.

Nous passons en Turquie à Posof (où nos sacs sont fouillés) et dormons dans une base militaire désaffectée à Göle après avoir passé Ardahan. Avertis par des jeunes du danger à rester dans la ville, nous entendrons deux ou trois coups de feu dans la soirée, et quatre véhicules blindés entreront dans la ville le jour suivant. Pourtant tout semble normal quand nous allons acheter notre pain. Drôle d’ambiance… Il fait froid et la pluie est menaçante, le plateau turc dépasse les 2000 mètres dans cette région.

Par ailleurs l’autostop n’est pas très facile, le trafic est presque inexistant. La Turquie est pourtant réputée accueillante et agréable à traverser. Mais nous supposons que le récent référendum, les tensions politiques, militaires et la crise économique plombent le moral et la confiance des habitants. La pression policière est importante, on passe quatre barrages de police entre Posof et Erzurum.
Nous dormons encore deux nuits sous la tente, à Tortum et à Torul. Le vent arrache des toits à Trabzon non loin de là et notre tente frémis un peu. Pas de chance décidément.
On s’amuse néanmoins un tout petit peu en demandant à nos conducteurs s’ils ont voté oui ou non au référendum. Il y a pas mal de kurdes par ici et le non l’emporte. Certains, kurdes ou non, traitent Erdogan de tous les noms, d’autres l’adulent, et la fracture dans le pays est nette et inquiétante.

A Tirebolu la pluie ne semble plus vouloir s’arrêter. Heureusement nous sommes accueillis dans les préfabriqués d’un chantier, et les ouvriers nous offrent lits, thé et nourriture avec de grands sourires. Au matin, après avoir faits nos adieux à l’équipe et à leur chat, nous partons en direction de Samsun. Nous y trouvons un hôte sur Couchsurfing, jeune dirigeant d’une société de métallurgie, et dégustons ensemble pide, ayran et börek avec vue sur la Mer Noire.

Nous voici désormais sur la route principale, direction Istanbul. Le soleil est finalement revenu après une semaine de mauvais temps et de froid et les belles rencontres reviennent elles aussi. A Kavak nous remangeons du börek, invités par un conducteur, responsable de la compagnie locale de distribution des eaux. Son bureau est digne de celui d’un maire, avec sièges en cuir, portrait d’Atatürk et drapeau national. Nous rencontrons ses collègues, ses amis pharmaciens et vendeurs internationaux de semence de taureau, et enchaînons deux thés, un café et une dizaine de photos en une demi-heure.
Plus tard, un chauffeur de camion nous offrira un repas de Chef, préparé avec sa bonbonne de gaz sur le bord de la route. Ça nous fait plaisir de manger un vrai repas…

Nous continuons et dormons dans un petit village près d’Ilgaz, dans une maison attenant à la mosquée. Les bâtiments sont en pierre et la vue est exceptionnelle. La famille de l’imam prend soin de nous, c’est une journée parfaite. La Turquie accueillante reprend ses droits.
Après un petit déjeuner avec pain de miel et fromage maison nous repartons vers Bolu.

Bolu est notre dernière nuit dans la nature. Nous montons sur une colline et campons à la chaleur d’un feu, cuisant quelques saucisses sur la braise. Le chœur des mosquées alentour nous endort et nous réveille pour notre dernier jour d’autostop.

Nous arrivons rapidement à Istanbul et nous nous asseyons quelques heures le long du Bosphore entre Beşiktaş et Bebek. La ville est ensoleillée et c’est un agréable moment pour terminer ce voyage.
Nous passons ces prochains jours chez deux amies, Serap et Buşra, et nous prendrons bientôt l’avion pour retourner vers nos familles.

Merci à tous de nous avoir suivis, nous écrirons un dernier article pour expliquer ce que nous comptons faire des nombreuses histoires, photos et vidéos de ce voyage…

A bientôt !

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