Il est rare de croiser des occidentaux ici, même pas une douzaine depuis que nous sommes arrivés.

Après une visite du vieux port de Jakarta nous avons quitté la ville pour nous rendre dans une région un peu moins fréquentée, près du volcan Katang. L’autostop est difficile, presque toutes les voitures sont des bus ou des taxis. Et aucun ne comprend pourquoi un occidental riche ne souhaite pas payer. C’est un cas de conscience pour nous, car d’un côté payer 10 euros de transport par jour augmente considérablement notre budget, mais pour eux il s’agit de gagner durement sa vie, avec des conséquences beaucoup plus graves que notre improbable banqueroute. Bon gré mal gré, nous nous confortons dans l’idée que voyager en bus ou en payant la nuitée changerait totalement l’expérience et nous apporterait bien moins.
Exemple:

La première nuit après Jakarta, nous cherchons un endroit ou dormir dans un village perdu, il fait nuit. Personne ne comprend ce qu’on veut, ils nous parlent d’hôtels à 50km de là et ont l’air bien gêné quand on leur demande un simple abri. Finalement un enseignant s’arrête et nous propose de nous emmener dans son école où nous pourrons dormir. On se retrouve sur son scooter à 3 avec nos deux sacs… Je brûle ma semelle sur son pot d’échappement (échec du jour). Puis nous nous retrouvons à visiter une école coranique pour garçons, puis une école pour filles 2km plus loin. Ils apprennent l’anglais, le deal est d’échanger l’hébergement contre un discours pour motiver les enfants à apprendre. Et nous voilà à parler à une centaine de filles des bienfaits du voyage et de l’anglais… On finira par chanter la Marseillaise au rythme de leurs mains et prendre une centaine de selfies. Incroyable moment, même chose avec les garçons qui eux se contentent de nous regarder d’un air béat.
Vaut-il mieux prendre le bus et dormir à l’hôtel ?

Le jour d’après: nuit dans une sorte de squat sur une colline, avec une vue fantastique, et visite de jeunes avec des lampes torches au milieu de la nuit qui s’éclipsent en s’excusant.
Quoi d’autre si ce n’est les sourires des enfants et les hello mister de toutes parts? Où ceux qui rigolent ou se fâchent gentiment en lisant notre panneau « numpang gratis », trajet gratuit. Ils s’arrêtent et posent des questions, nous essayons de répondre tant bien que mal pour le bien d’une future génération d’autostoppeurs.
Ce soir nous sommes logés dans la maison d’un chef de la police locale, maison cossue, tour des spécialités locales, et soirée avec un gangsta guitariste et un ancien policier qui a tenté de travailler aux Pays-Bas avant de s’en faire renvoyer… Tout cela autour d’une bouteille de vin indonésien.
Nous avons eu beaucoup de chance ces derniers jours. Nous les dédions à ceux qui nous manquent déjà, et qui nous ont laissés partir.
Terih Makasih (merci)
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Wahyu s’arrête pour nous, il travaille comme commercial pour la graineterie Matahari dans toute la région de Jambi. Il nous invite chez lui au milieu d’immenses forêts de palmiers, ceux produisant l’huile de palme. Leur accueil est formidable, sa femme nous prépare un gâteau, et nous faisons avec eux une gélatine grâce à des feuilles et de la cendre de feuille de bananier. Nous visitons le chef du village et ses parents avec thé ou café à chaque fois comme le veut la tradition. Le lendemain il nous propose de visiter la montagne à 100km de là. Nous y découvrirons des plantations de café, de cannelle et de pommes de terre ainsi que de belles rizières. La déforestation est bien là et grignote sur la pente des volcans malgré les interdictions du gouvernement. Wahyu affirme que les locaux se battent parfois entre eux pour le contrôle du territoire. Lui et beaucoup d’autres sont contre ces pratiques agricoles intensives et extensives, mais les alternatives et les investissements qui vont dans ce sens sont rares. Non loin de là, près de Jambi, on avait pu observer une usine Nescafé, nous rappelant que ces situations sont directement liées à nos comportements de consommateurs en Europe.

Le jour suivant on vit notre premier accident. Pris par un conducteur de camion, nous nous arrêtons sur le bas côté pour qu’il achète de l’eau, un autre camion s’écrase à l’arrière. Ses freins ont lâché. Sa cabine est complètement disloquée et un des conducteurs est bloqué à l’intérieur. Heureusement personne n’est blessé, mais c’était impressionnant et cela nous rappelle les risques que nous prenons.



Le deuil du peuple thaïlandais pour son roi est toujours en cours, et la majorité des habitants porte du noir en son hommage. De grands portraits du roi et des draps de même couleur sont omniprésents dans les rues, et chaque maison ou magasin affiche des photos du couple royal. Il est bien parti pour être l’Ataturk thaïlandais. En posant quelques questions on a appris qu’il était mort à 89 ans et était devenu populaire grâce à son aide aux plus pauvres. Avec des ingénieurs il visitait par exemple les régions où les sols étaient les moins fertiles et donnait des conseils aux paysans sur les plantes et les techniques les plus adaptées.
Pour nous rendre ensuite à Ayutthaya, ancienne capitale, nous avons pris un train à 30 centimes d’euros… Où à cause d’une overdose de tourisme nous nous sommes échappés vers Ban Goom. Une officier de police nous y a généreusement hébergés contre un peu de ménage dans une de ses maisons familiales en bois. Le matin suivant, nous avons bu un café dans une coopérative de riz et sa sœur et un ami nous ont fait visiter un vieux monastère local plein de reliques, de faïences et de parchemins. Nous sommes ensuite partis en direction de l’Ouest sur une belle route le long de montagnes, avant de nous faire des contacts dans un marché et de dormir dans les installations sportives du village de Lan Sak.
Enfin après ces quelques jours à ne parler qu’entre nous nous rencontrons un vieil homme qui nous héberge dans le futur hôtel de sa femme, à Ban Nong Bon. L’environnement est très agréable, nous allons nager dans la rivière d’à côté et essayons quelques nouveaux plats avec notre hôte. Notamment une très bonne salade de papaye. Il parle correctement anglais et nous avoue ne pas l’avoir pratiqué depuis 50 ans.
A Siem Reap, la ville à proximité d’Angkor Wat, des hôtels luxueux s’alignent tout le long de la route, ce qui contraste énormément avec les villages précédents. Les conducteurs de tuktuk gèrent les lieux, et tous ont des chambres d’hôtes à proposer.
Ensuite nous avons dormi deux nuits à Battambang. La première dans une école auto financée en vendant des fruits et légumes, des vêtements, ou en hébergeant des touristes. Une des jeunes femmes y travaillant cumulait des jobs 7/7 pour payer les études de ses frères et sœurs, tandis qu’une autre nous a expliqué à quel point il lui était difficile de se marier avec son fiancé, faute d’argent et de problèmes religieux.
Ensuite nous avons bougé vers un village flottant, où le stéréotype de la route boueuse et des maisons en taule était encore plus présent que les jours précédents. Cependant on se doit de préciser que les cambodgiens vivent assez bien dans ces conditions, et ce que l’on interprète en Europe comme un manque de confort est souvent une différence culturelle ou simplement climatique. Matelas, fenêtres, clôtures ont rarement une utilité, hamacs et cuisine à l’extérieur étant bien plus pratiques ici.
Le matin nous attendons une heure et demi pour trois voitures, la dernière nous conduisant à travers la jungle jusqu’à Oh Saom. La région est belle mais hostile, avec des lacs abritant certainement des crocodiles, ou des tigres qui paraît-il attaquent régulièrement des poulets jusqu’aux buffalos des fermiers. Pas sûr que les cinq chiens par famille suffisent pour les protéger.
Sur la route de Phnom-Penh, les hangars de l’industrie du textile s’alignent, certains sous label chinois, confirmant le déplacement de l’activité d’un pays à un autre. Vers 7h du matin les minibus et les scooters commencent leur exode, certains s’arrêtant comme nous pour manger bouillie de riz et poisson du Mekong assorti de quelques beignets.
La sortie s’avère compliquée: après 5km de marche un couple nous ramène dans le centre par quiproquo, malgré notre insistance pour nous arrêter, et nous devons négocier avec eux et la compagnie de bus où ils nous ont déposés pour revenir à la case départ. Finalement nous pouvons rejoindre Chealea, et une Pagode accepte de nous y accueillir. Deuxième problème de la journée, les restaurants de la ville nous affirment qu’ils n’ont pas de nourriture. Ces petites galères, illogiques pour nous, sont assez fréquentes depuis le début au Cambodge. Mais même si nous y trouvons quelques remises en question intéressantes, le moral n’est pas au plus haut. Heureusement trois jeunes vont prendre le statut de moine le lendemain et nous pouvons rester deux nuits pour observer la cérémonie.
Le karma nous revient alors que nous sommes sur le point de quitter le Cambodge : un couple allant à un mariage nous prend en stop et nous avons droit à notre deuxième cérémonie de la semaine. Nous trinquons avec les mariés et mangeons avec leur famille, parmi un petit millier d’invités. Les rituels sont assez différents des traditions chrétiennes, par exemple les invités apportent chacun à leur tour un cadeau dans la dite « chambre du marié » après une procession dans la rue, ou encore la famille proche fait semblant de couper les cheveux du couple en les aspergeant de parfum avec une rose. Nous nous renseignerons dans le détail à notre retour, n’ayant pas tout compris.
Nous quittons cette fête repus et traversons la frontière vers le Laos, que toute la région prononce Lao, le colon français ou l’Académie n’acceptant sans doute pas ces deux voyelles solitaires ? Je vous laisse chercher.
Nous allons ensuite vers Pakse pour encore y dormir dans une Pagode, avec la chance d’y rencontrer des étudiants-moines parlant anglais. On y apprend les différentes règles du Bouddhisme allant de 5 pour un pratiquant, 10 pour un moine de moins de 20 ans et 227 au-delà. Elles ne semblent pas imposées mais recommandées, et parmi les cinq fondamentales chaque bouddhiste devrait par exemple s’abstenir de boire. Nous pouvons donc échanger, ce qui rend plus acceptable notre séjour dans un lieu dédié aux plus pauvres ou aux plus âgés, ce que nous ne sommes absolument pas.
Pour l’anecdote, près de Khamsida, la seule personne parlant un peu anglais parmi la cinquantaine de villageois qui nous interpellent est transsexuelle et semble parfaitement à l’aise parmi eux, ce qui nous semble très bien. Nous échangeons un peu avec elle et partons chercher un campement vers un lac qui s’avère être un marécage. La malaria va finir par nous attraper !
A propos des légendes, nous avons décidé de prendre autant de vidéos et de notes que possible sur les traditions et la vie de tous les jours, et nous les présenterons probablement sur une carte interactive. Le documentaire semble trop complexe à réaliser, les situations étant trop différentes pour avoir un fil directeur et une cohérence. Nous verrons ! Nous avons en tout cas du contenu.
Les forêts apportent quelques richesses, les camions de débardage sont nombreux, mais on peut apercevoir également de l’orpaillage et des métiers à tisser sur le pas des portes.
Les conducteurs conduisent d’ailleurs très mal, nous avons trouvé plusieurs camions défoncés sur notre route, et malheureusement une personne en scooter probablement morte. Les maisons sont construites à un ou deux mètres des routes où les voitures circulent à 80 km/h, et les enfants collectent les roseaux au bord des routes sinueuses, sans compter ceux qui se garent au beau milieu ou dans les virages. Et nous parlons des principales routes du pays. Nous espérons donc que le Laos fait ou fera des efforts de sensibilisation…
Aux abords d’Oudomxay, des jeunes filles et des garçons portaient des vêtements traditionnels pour fêter la fin de l’année. Ici, dès le 30 décembre les rues sont animées et les sonos sont de sortie. A Oudomxay nous avons passé la nuit dans une école regroupant différents métiers, élevage, restauration, électricité, construction… Mais l’administration était partie fêter le nouvel an et ceux encore sur place nous ont tout juste laissé planter la tente.
Nous quittons donc le Laos avec l’impression d’être passés à côté du pays, sans vraiment découvrir sa culture. C’est le jeu, et nous avons probablement manqué de chance.
A Dien Bien Phu, vers 10h du soir, nous galérons à trouver un endroit à l’écart pour planter notre tente. Notre première nuit au Vietnam se passe pourtant bien, un étudiant s’arrêtant en pleine nuit avec son scooter pour nous inviter chez lui, ce que nous n’aurions peut-être pas fait nous-même dans les mêmes conditions.
Après Son La nous devons attendre 4h mais la première voiture qui s’arrête nous amène d’un coup à Hanoï, 7h de route plus loin, à travers de très belles collines escarpées entre lesquelles s’alignent des rizières en terrasse. A Hanoi nous devons marcher une dizaine de kilomètres pour rejoindre notre couchsurfer dans un bâtiment dédié à des startups, la circulation est intense et rappelle Jakarta par son taux de scooters, mais les trottoirs sont bien plus nombreux. Nous y resterons d’abord quatre nuits, nous reposant et essayant de faire accepter notre dossier par l’ambassade de Chine. Nous goûtons quelques plats, achetons quelques nouveaux vêtements, et remplaçons une paire de chaussures usée par les 1200 km parcourus à pied depuis Jakarta.
La pluie est battante, et n’utilisant pas de bus nous testons l’étanchéité de nos affaires. Résultat assez positif ! Nous passons ensuite deux autres nuits à Hanoi, cette fois avec un avocat d’affaires qui nous présente à ses amis dirigeants de start ups. Ils nous montrent leurs bureaux et se comparent à d’autres membres de la haute société vietnamienne qui selon eux se reposent bien trop sur leurs acquis et leur réseau. Leurs trois dernières applications mobiles sont un succès, l’un deux dirige une compagnie de distribution d’eau, l’autre distribue des logiciels PRM aux entreprises locales etc. Nous restons en tout cas sur une vision très positive et dynamique de la ville, avec pour seul défaut l’absence totale de règles de conduite ou de parking.
Le jour suivant nous pouvons rejoindre Ha Long, malgré l’omniprésence des bus et taxis sur la route. La côte est défigurée par les hôtels mais la baie elle-même disparaît dans la brume et les îles semblent hors de portée des touristes, en apparence seulement au vu des ferrys qui s’y glissent furtivement.
Le lendemain nous sommes à Lao Cai, ville riche, ne serait-ce que par la quantité de bijouteries.
A peine franchi la frontière, un couple d’une vingtaine d’année s’arrête et nous invite à dîner. Nous passons donc nos premiers jours en Chine dans un village communautaire, organisé autour d’un terrain de basket et perdu dans des champs de bananiers. Les différentes familles nous invitent à manger chez elles l’une après l’autre, et notre appétit doit suivre, d’autant qu’ils mangent apparemment quatre fois par jour.
Notre trajet vers Kunming commence au péage où un policier arrête les voitures pour nous. Il en trouve une après une vive discussion et nous ne savons pas si notre conducteur nous emmène de son plein gré, même s’il s’avère sympathique par la suite.
Nous dormons pour la première fois en dessous de zéro degré dans notre tente, et la limite de l’équipement semble presque atteinte. Le froid étant le plus vif le matin, au moment de plier la tente, nos doigts sont gelés. Nous essayons désormais de ne plus dormir dehors, et demandons directement aux passants de nous héberger. La nuit suivante nous la passons dans l’annexe d’une église, puis dans un magasin etc…
A Chengdu, nous passons le nouvel an chez une famille, dans le district de Xin Du. Nous y sommes accueilli chaleureusement encore une fois, et profitons des pétards assourdissants et des feux d’artifices de toute part. Ils sont plus ou moins interdits dans le centre mais pas dans ce district en banlieue. Nous visitons un temple bouddhiste pris d’assaut pour y brûler des bâtons d’encens. Nous y jetons les nôtres sur les différents brasier, puis nous envoyons quelques ballons de papier dans les airs avant d’aller dormir. Les pétards mitraillettes du matin nous réveillent après une accalmie de quelques heures…
Nous voici à Mianyang avec beaucoup à dire sur ce pays continent. Nous manquons malheureusement de temps pour décrire tout ce que nous découvrons et toutes nos réflexions…